Si le télétravail fait souvent rêver, il concentre aussi une forte appréhension à son égard. Quoiqu’il en soit, il fait débat !
Alors, est-il une aubaine et une solution d’avenir ou une fausse-bonne idée à fuir absolument ? Pour vous aider à choisir, voici quelques éclaircissements scientifiques.
Voyons ensemble les bons et les mauvais côtés du télétravail.
Pourquoi le télétravail est une bonne idée
Nos sociétés sont entièrement structurées autour du travail, dans sa forme traditionnelle. En cela, le télétravail est un changement de paradigme fort et ses conséquences ne concernent pas seulement les entreprises et leurs employés mais aussi la société dans son ensemble, comme nous allons le voir.
Le télétravail augmente la productivité
Le télétravail bénéficie à l’entreprise, notamment en augmentant la productivité de ses employés. Une étude américaine1 parlait de 10-40% d’augmentation ! Ce gain de productivité est particulièrement important pour les tâches complexes et notamment pour les tâches nécessitant de la créativité, comme le montre une étude autrichienne2.
Le télétravail augmente la flexibilité et la résilience
Cette amélioration de la productivité se fait également de manière plus indirecte, en augmentant la flexibilité de l’entreprise et sa résilience. Premièrement, le télétravail permet des horaires de travail différents entre les employés. Ceci augmente la plage horaire couverte par l’entreprise pour répondre à ses clients, particulièrement si les employés travaillent dans des fuseaux horaires distincts. Deuxièmement, la dispersion des salariés rend l’entreprise plus résiliente et moins sensible aux intempéries (catastrophes naturelles, etc.) et aux imprévus (grèves, attentats, etc.).
Le télétravail réduit les dépenses
De même, le télétravail contribue à l’optimisation du fonctionnement de l’entreprise. Il réduit les coûts générés par les locaux (loyer/impôts, chauffage, etc.), mais aussi les frais causés par le turnover des salariés. En effet, les employées qui déménagent peuvent rester dans l’entreprise et n’ont pas besoin d’être remplacés.
Le télétravail améliore la qualité de vie au travail
Concernant les employés, le télétravail améliore leur qualité de vie au travail (QVT), selon plusieurs études. Il améliore le moral et la motivation3. Il permet un meilleur contrôle de son travail qui, à son tour, diminue les intentions de démissionner et permet un meilleur équilibre vie professionnelle/personnelle4. D’un point de vue purement pratique, les télétravailleur-se-s économisent aussi du temps, gagné sur leurs trajets.
Le télétravail est écologique
L’intérêt du télétravail est aussi sociétal et peut être intégré à une stratégie de responsabilité sociétale d’entreprise (RSE). En effet, en évitant aux travailleurs d’avoir à se rendre sur leurs lieux de travail, le télétravail désengorge le trafic urbain et contribue à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Il est donc écologique, comme le montre une équipe de recherche britannique5.
Le télétravail facilite l’accès au travail
Le télétravail joue également un rôle essentiel dans l’accessibilité. Il facilite le retour au travail des jeunes mères, comme le montre une étude britannique6. Il améliore aussi l’accessibilité pour les personnes en situation de handicap ou pour celles qu’une maladie récente a fragilisées.
Pourquoi le télétravail est une mauvaise idée
Le télétravail a de nombreux avantages, mais comporte également des inconvénients. Les comprendre est un premier pas pour les contrer.
Le télétravail isole les employés
La conséquence négative la plus visible du télétravail est l’isolement. La baisse des interactions avec nos collègues peut nous enserrer dans un sentiment de solitude et nous désengager de notre travail. C’est ce que montre une étude néerlandaise7, même si ses auteurs ajoutent qu’une bonne communication permet de limiter ce phénomène.
Le télétravail a un impact négatif sur la santé mentale
D’autres études vont dans ce sens en mettant avant l’apparition d’émotions négatives chez les télétravailleur-se-s, comme la solitude, l’irritabilité ou la culpabilité. Ils et elles manifestent également des symptômes propres au stress8. De même, le fait de travailler chez soi met à mal le besoin de déconnection entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle. Cette situation favorise le surmenage et l’épuisement.
Le télétravail réduit la productivité
Enfin, nous vous disions plus haut que le télétravail augmente la productivité. En réalité, ce gain est essentiellement valable pour les tâches complexes. Pour les tâches répétitives, le télétravail a un effet plus négatif2.
Conclusion
Comme vous avez pu vous en rendre compte, certains résultats sont contradictoires. D’une part le télétravail améliore la qualité de vie au travail et d’autre part il porte atteinte à la santé mentale. Il favorise la productivité pour certains types de tâches et l’inhibe pour d’autres.
Il en résulte que le rôle du télétravail est plus complexe qu’il n’y parait. La présence à la fois d’avantages et d’inconvénients met en avant l’importance d’un bon management. Pour être utile et efficient, le télétravail doit être murement réfléchi, notamment concernant ses difficultés et les moyens que nous envisageons pour les surmonter.
Références
- Nie, N. (1999). Tracking the techno future. American Demographics, July, 50.
- Glenn Dutcher, E. (2012). The effects of telecommuting on productivity: An experimental examination. The role of dull and creative tasks. Journal of Economic Behavior & Organization, 84(1), 355–363.
- Bailey, N. B. K. D. E., & Kurland, N. B. (1999). The advantages and challenges of working here, there, anywhere, and anytime. Organizational dynamics, 28(2), 53-68.
- Kossek, E. E., Lautsch, B. A., & Eaton, S. C. (2006). Telecommuting, control, and boundary management: Correlates of policy use and practice, job control, and work–family effectiveness. Journal of Vocational Behavior, 68(2), 347-367.
- Egbuta, I. C., Thomas, B., & Al-Hasan, S. (2017). The contribution of teleworking towards a green computing environment. In Nature-Inspired Computing: Concepts, Methodologies, Tools, and Applications (pp. 1723-1738). IGI Global.
- Chung, H., & van der Horst, M. (2018). Women’s employment patterns after childbirth and the perceived access to and use of flexitime and teleworking. Human Relations, 71(1), 47–72.
- De Vries, H., Tummers, L., & Bekkers, V. (2018). The Benefits of Teleworking in the Public Sector: Reality or Rhetoric? Review of Public Personnel Administration, 1(24),
- Mann, S., & Holdsworth, L. (2003). The psychological impact of teleworking: stress, emotions and health. New Technology, Work and Employment, 18(3), 196-211.
Article initialement publié sur LaborAgora.com en juillet 2019.
Image de couverture : KATRIN BOLOVTSOVA